C’était une nuit comme beaucoup d’autres, nous venions de nous coucher quand Lucie se réveilla et m’appela. Le temps de la rassurer et qu’elle se rendorme, le Chti ronflotait tranquillement dans notre lit. Aussi silencieusement que possible je me glisse sous la couette à ses côtés quand il se retourne à moitié assoupi et m’enveloppe dans la chaleur de ses bras…Sauf que…
Étiquette : amour
C’était il y a déjà plusieurs semaines. Lucie avait demandé à se laver avec son père et ils jouaient sous la douche tandis que, assise à côté de la baignoire, je riais de bon cœur avec eux.
C’était une soirée comme les autres, comme celle de la veille et celle du lendemain, nous suivions l’immuable rituel du coucher de Lucie (bain-bib-repas-histoires-dents-dodo), jusqu’à ce que le Chti, dans un élan de son cœur, lui confesse un joli secret… Doux Papa aimant et innocent qui n’imagine pas combien sa petite fille évoluera encore et trouvera étrange, à 14 ans, d’avoir pu réclamer à cor et à cri que son vieux papa partage son bain.
C’était un tendre message d’amour que j’ai conservé dans un coin de ma tête, me jurant un jour de le dessiner pour en garder une trace…
Exceptionnellement pour cette semaine, il ne pleuvait pas, aussi j’étais sortie au parc avec Lucie pour défouler ma mini-monstre. Le froid rougissait le bout de son nez et ses petits doigts glacés étaient serrés sur les chaînes de la balançoire. Tandis que je la regardais se balancer, enfouie dans son manteau, mon esprit voyageait.
Ce froid dans mes os me rappelait les soirées avec son père sur le bord des quais déserts de la Gare du Nord, ces longues minutes à attendre l’affichage du train pour le Pas-de-Calais, pressés l’un contre l’autre à côté des tubes chauffants, le cœur lourd à l’idée de la séparation prochaine mais déjà tourné vers la prochaine fois…
Ce matin je me suis réveillée amoureuse, toujours. Que ce soit à 4h quand j’ai dû me lever pour nettoyer le vomi de Plume et qu’à mon retour sous le drap, il est venu, assoupi, me prendre dans ses bras pour me serrer contre lui, ou à 8h du matin quand Lucie m’a appelée pour le biberon du matin et qu’il était déjà parti, en catimini, pour le travail.
Pourtant nous sommes plus fatigués qu’à nos vingt ans, plus soucieux aussi avec les responsabilités qui se sont accumulées depuis la naissance de Lucie. Il a fallu construire un nouvel équilibre à trois, le temps pour nous s’est réduit comme peau de chagrin et nous traversons chaque évolution de Lucie comme un grand huit : des coliques à ses sourires et câlins, des dents à ses premières fois.
Il a fallu également que je m’habitue à ne plus être l’unique reine du cœur de mon Chti, il y a maintenant une concurrente de taille ! Cette petite princesse qui le fait sourire dès qu’il franchit le seuil de la porte le soir, chassant de son cri de joie tous les nuages du travail.
Mais notre moment à nous, ma dose de Juju nécessaire pour une journée, c’est le soir, c’est la nuit. C’est papoter ensemble tandis qu’on se lave dans l’eau gelée du bain de Lucie, trois heures après elle. C’est avoir un gros fou rire en constatant que, tandis que nous nous lavions, Plume avait vomi sur notre couette (et à ma place) avant d’aller se coucher l’air mi-penaud, mi-désolée au pied du lit (oui deux fois dans la même nuit, vive la saison de la mue). C’est se battre en pouffant pour savoir qui aura à ses pieds la partie de la couette avec ce doux parfum millésimé 2016 « thon en croquette ».
Merci mon Ju d’être là pour moi, pour nous.
On ne choisit pas sa famille mais ses amis dit l’adage. Ma fille, je ne l’ai effectivement pas choisie. J’ai tout au plus influencé les possibilités en choisissant le géniteur, mais cela s’arrête là. Pourtant je l’aime ma fille, même si je ne l’ai pas choisi.
Beaucoup de mamans me parlent de la vague d’amour qu’elles ont ressenti quand, à la naissance, a été déposé sur leur ventre leur enfant. Ma vague d’amour à moi a dû être avalée par le raz-de-marée de culpabilité que j’ai ressenti en la touchant timidement pour la première fois dans sa couveuse, de longues heures après sa naissance. Pourtant je l’aime ma fille, même si je n’ai pas eu ma vague d’amour.
Les esprits scientifiques vous expliqueront que je l’aime parce qu’elle a de grands yeux bleus, une bouille ronde et de doux trait similaires aux miens, autant d’efforts de sa part pour me plaire, m’attendrir et m’attacher à elle afin que je la protège et la nourrisse jusqu’à ce qu’elle soit autonome.
Moi je crois que si je l’aime, c’est parce qu’elle, elle m’a choisie. En naissant, elle m’a faite Maman, comme elle a fait le Chti Papa. C’est avec nous qu’elle apprend et explore, c’est contre nous qu’elle vient se réfugier et se réconforter.
Elle lui ressemble beaucoup, elle me ressemble un peu. Elle est un peu de nous et beaucoup d’elle : sensible, aventureuse, pétulante, aimante et merveilleuse.
Mon cœur bat quand j’entends son rire cristallin tinter, toute à sa joie ;
Mon cœur se brise quand je la vois pleurer à chaudes larmes, écrasée de désespoir ;
Mon cœur sourit quand je l’entends envoyer des bisous à Plume, comme une vieille mobylette pétaradante ;
Mon cœur fond quand je la vois courir pour s’accrocher aux jambes de son père, l’accueillant avec des cris de joie ;
Mon cœur brûle quand elle dépose sa tête au creux de mon épaule, abandonnée et confiante ;
Ma fille, je l’aime.
Juin 2007, nous allons fêter nos deux ans de couple. J’ai passé mes partiels avec succès, lui termine son stage de 4ème année. Comme une fois par mois, il est descendu du Pas-de-Calais pour passer une journée avec moi sur Paris.
Soucieuse de lui plaire et de l’épater, je veux l’emmener visiter un quartier de Paris que je viens de découvrir mais, comme d’habitude, je me suis perdue ! Les pieds fourbus, nous nous réfugions sur un banc dans le parc de Bercy. Nous lézardons tranquillement, collés l’un à l’autre, quand un couple de touristes s’arrête…
C’était une nuit comme les autres, les laudes n’avaient pas encore sonné que Plume appelait pour son en-cas de mi-nuit… … mon devoir accompli, je me jetais dans le lit, replongeant avec délice dans les bras de Morphée…… le Chti à demi-assoupi entrouvrit l’œil en m’entendant m’élancer…… et… Quelques explications après…… et les émotions passées…… nous nous rendormîmes pour le reste de la nuit et mon cerveau tâcha d’oublier ce malencontreux incident… Mais c’était sans compter sur mon Chti qui aime me remémorer mes grands moments de gloire…Voilà voilà… Je brutalise mon mari en dormant…