J’avais déjà évoqué rapidement ce sujet : un bébé est pourri de l’intérieur ! Si nombre de mamans vous vendent la bonne odeur de leur bébé, c’est qu’elles viennent de l’astiquer dans son bain !! Parce qu’autrement, quelle arnaque ! ON VOUS MENT !!!!En réalité, il n’y a que les savons pour bébé qui sentent bon le bébé !
Année : 2015
Avoir un enfant est une lourde responsabilité pour les parents. Toute décision peut avoir un impact sur sa vie d’adulte future, sa santé, sa place dans la société, son éducation, son bonheur, sa relation avec les autres, … Et en ce moment, tous les jours je prends des décisions qui seront décisives dans la vie de Mogwaï…Voui… Une décision cruciale et impactante sur son avenir ! Au moins cinq fois dans la journée et tous les jours de toutes une semaine, je choisis le motif de la couche de ma fille : par ordre d’apparition cœur moche, tortue, chien (ou ours je sais pas trop – de toutes façons je l’aime pas celui-là), cœur joli (avec des étoiles !), girafe puis éléphant. Oui-da madame ! Oui-da monsieur ! Je connais l’ordre des motifs dans le paquet New Baby taille 1 de Pampers ! Et j’ai mes chouchous : la girafe, l’éléphant et le coeur joli (avec des étoiles donc !).
Je ne vous raconte pas quel a été le comble de mon excitation quand j’ai découvert les motifs du paquet New Baby taille 2 acheté pour tester si les cuissots musclés de ma fille ne seraient pas moins serrés dans la taille au-dessus…Et si je pleure ma girafe adorée, j’accueille avec joie le chat !!
Vivement la taille 3 maintenant !!!! Je voudrais un zèbre Monsieur Pampers !!!
Lucie est un très petit bébé née à terme (même si pour nous ce sont plutôt les autres bébés qui sont des géants !). Médicalement ils parlent de « retard de croissance in utero« , ou RCIU pour les intimes. Un RCIU sévère car, par rapport à son âge gestationnel, elle faisait partie des 3% des plus petits nourrissons. Et un retard harmonieux, c’est-à-dire proportionné, car tout son corps est petit, de façon harmonieuse donc.
Le retard harmonieux indique que c’est une anomalie qui a commencé très tôt dans la grossesse. Et dans le cas de Lucie, cela a indubitablement débuté avant les 3 mois de grossesse. Cela explique l’erreur de datation des échographies.
D’après mon cycle de règles (que je note scrupuleusement sur mes calendriers depuis des années), la fécondation devait avoir eu lieu dans la semaine du 21 avril. Et au plus tard le 26 avril car ce jour là j’avais été bizarrement malade 3 heures (fatigue soudaine, vertiges, crampes, courbatures, …). Drôle de maladie qui prit tout son sens une fois la grossesse découverte…
Or lors de notre première visite chez le gynéco pour la première échographie, le 30 juin soit 3 mois selon nous après le début de la grossesse, le gynécologue nous dit que nous étions venus trop tôt et data le début de grossesse au 29 avril. Vous me direz 26/29, c’est pas une grande différence. Effectivement, sauf que le 24 juillet, lors de notre seconde première échographie, le début de grossesse de Mogwaï passa du 29 avril au 6 mai.
En se trompant de deux semaines dans la datation de la grossesse et ce dès le début de la grossesse, la courbe de taille de Lucie était faussée dès le départ et son retard de croissance est passé totalement inaperçu jusqu’au bout.
Le RCIU peut également être une des explications pour l’anamnios découverte lors de l’accouchement, c’est-à-dire le manque de liquide amniotique. Chose qui aurait pu être vue lors des examens du mois de janvier…
Mais au final, pourquoi ce retard ? Jusqu’il y a une semaine, nous n’avions aucunes certitudes. Les seules choses que nous pouvions écarter étaient la cigarette et l’alcool. Beaucoup de RCIU restent inexpliqués et on pensait finir dans cette catégorie vu le manque d’enthousiasme du gynéco à comprendre ce qu’il s’était passé. Mais les résultats de mon placenta sont arrivés et ça a été une petite douche froide à nouveau.
(Oui quand le Chti essaye de consoler, c’est très rationnel
– et ça ne marche pas du tout avec moi !)
Pour reprendre le rapport mot à mot : « Hypotrophie placentaire. Dans le placenta il existe plusieurs foyers d’infarctus anciens dont le plus volumineux sous-chorial est au contact de la zone d’insertion du cordon. Présence également d’un foyer hématome basal de 1cm grand axe ».
Alors, je sais pas vous, mais pour moi c’était du chinois. J’ai donc été cherché mon petit gros Larousse (le petit il a pas ces mots là !), j’ai appelé mon pote Google et j’ai été lire des cours en ligne de sage-femme et de gynécologie.
L’hypotrophie signifie que mon placenta était plus petit que la normale, le mien était à 325g. Les infarctus placentaires sont des zones mortes, où la circulation de sang passe plus ou mal. Asymptomatiques, ils sont présents dans un quart des grossesses à terme sans forcément compromettre la grossesse, quand le placenta vieillit. Mais dans mon cas, présent dès le début et couplé à ma mauvaise circulation sanguine, j’ai finalement pas été « une si bonne mère » que ça pour Mogwaï, le Chi devrait me jeter !
(J’avais trouvé la blague douteuse alors,
aujourd’hui je ris encore plus jaune !)
Je ne suis pas docteuresse ou statisticienne, je ne sais pas à quel degré nous avons eu de la chance que Mogwaï arrive en fin de course et en bonne santé malgré son poids plume. Si jamais nous souhaitons lui donner un petit frère ou une petite sœur, il faudra aller au fond du problème en amont et durant la grossesse avoir un suivi pointilleux et rigoureux.
En attendant, ma petite fille est un vrai concentré de bébé ! Toute vive, toute bruyante, toute pétante !
Lucie venait de s’endormir et j’allais enfin rejoindre Morphée moi aussi, le Chti dormait lui déjà depuis 2h. Vu que mon dernier pyjama avait été redécoré par ma petite fille adorée et que ce n’est pas les tropiques en ce moment niveau température, j’ai fouillé dans le noir notre placard pour me trouver un pyjama propre.
C’est alors mon pyjama de fin de grossesse qui est sorti, pyjama qui est maintenant bien trop grand quand même. Résultat le lendemain soir…
Et comme ça je perds plus mon pantalon sans cesse !
Devenir maman c’est être maso sur les bords : un bébé ça te hurle dessus, te régurgite dessus, te pisse dessus, te chie dessus, bref un condensé de moments magiques. C’est pourquoi ils sont si mignons d’ailleurs selon certaines théories : pour qu’on ait des remords à vouloir les mettre dans une poubelle, pour qu’on fonde devant eux en une minute, oubliant d’un coup les envies de meurtre qui nous démangeaient depuis 4h.
Je me dis que vu comment Lucie est mignonne (en toute impartialité maternelle bien sûr), ça doit vouloir dire qu’elle est très chiante exigeante ! Mais moi elle me fait totalement craquer. Son dernier truc pour me mettre dans sa poche en moins de deux, c’est me faire aheu avec un petit air malicieux…Ah-eu qu’elle module parfois en long arheeeu totalement craquant…
Et elle m’a même fait quelques gueuh !!! Ma fille elle est trop forte, à 2 mois elle sait dire 4 lettres !!
Et si Papa se moque (un peu) de la maman-gaga, lui aussi fond comme neige au soleil face aux arheu de Lucie….
2 mois que notre vie a été chamboulée par une mini-crevette devenue crevette. 3,67kg au compteur et au moins 53cm ! Lucie pourrait enfin entrer dans le porte-bébé que je lui avais choisi avec amour durant ma grossesse… Enfin si elle le voulait bien parce qu’on est tellement mieux à gigoter par terre visiblement !
C’est son comportement qui a le plus évolué : nous sommes loin des sourires aux anges du début d’un bébé sac à patates. Elle nous reconnaît bien désormais et nous sourit de tout son petit corps quand je viens la chercher au fond de son lit le matin ou quand son père vient la saluer en rentrant du travail. Elle est loin mon bébé et sa position du crapaud au fond de sa couveuse… Autre grande évolution, Mogwaï parle ! D’abord des « ah-eu » devenu « arheu » et auxquels s’ajouta quelques « gueuh ». Rien ne l’amuse plus que de dialoguer avec ses parents gaga (fin surtout sa mère) !
Cependant son jeu préféré reste le tirage de cheveux de maman (déjà que je les perds avec la fin des hormones de grossesse) ! Je pense qu’on peut l’inscrire pour les Olympiades du tirage de poils. Quand au Chti et ses cheveux courts, il n’est pas mieux loti… Autre évolution côté maman : je suis plus à l’aise car je commence à la connaître un peu ce bébé gigoteur et surtout à connaître deux/trois astuces pour tenir la bête ! Ainsi s’il y a un an l’emmaillotement pour moi tenait des bouquins d’histoire médiévale, depuis j’ai eu une petite fille trop curieuse qui parfois peine à trouver le sommeil tellement elle est agitée.
J’ai donc toutes les nuits une petite momie dans son lit (avec ses bandages au pieds pour corriger ses pieds varus, ça reste dans le thème Égypte antique !)
Les premières choix cornéliens de maman arrivent aussi avec les deux mois et les premiers vaccins que je redoute un tout petit peu…
Je ne pouvais pas terminer l’histoire de ma grossesse sans en raconter son « apogée », en vous narrant l’accouchement. Tout un chacun peut ne pas apprécier de lire ce type de récit, surtout que je ne me suis pas particulièrement amusée ou sentie amusante cette nuit-là. Pour les autres, de peur d’ennuyer avec ses multiples rebondissements, j’ai décidé de scinder en plusieurs parties ma soirée pour la rendre plus digestible. En voici la dernière partie, celle où ça se termine bien…
► Lire la première partie
► Lire la seconde partie
***
Le bloc est d’un blanc lumineux éblouissant. J’entends des gens s’agiter autour. Je suis portée sur une nouvelle table. Mes bras sont attachés en croix. Ils tremblent, je n’arrive plus à les contrôler. On m’installe des capteurs, m’injecte des produits, un anesthésiant plus fort. Mon corps est tartiné à la hâte de Bétadine. Un grand drap vert pâle est placé sous ma poitrine. Il devient mon seul horizon avec le plafond.
Les minutes s’égrainent lentement. J’espère que Mogwaï tient le coup. Je perçois l’agitation de l’autre côté du drap. Pourvu qu’elle aille bien. Il n’y a pas l’heure de visible dans cette salle, je ne sais pas depuis combien de temps je suis allongée là. Je tremble des bras si forts que la table tremble avec moi et qu’il faut resserrer le capteur cardiaque autour de mon doigt. Un homme s’assoit à côté de mon visage et me demande doucement si ça va. C’est le premier à s’en soucier, c’est gentil.
Je ne l’avais pas reconnu avec sa tenue de chirurgien. Je ne suis plus seule, mon Chti est enfin là. On attend. Encore. On attend. Toujours. J’ai perdu toute notion du temps. Mes tremblements secouent toujours les harnais qui maintiennent mes bras. On badine avec le Chti pour ne pas songer à ce qu’il se passe derrière le drap… Où ils en sont ?! Pourvu que Mogwai soit toujours là… Pourvu… Je crois entendre le docteur demander « où est-elle ? » Mon ventre ne me semble pas un dédale incommensurable, elle est dedans, sortez-là !!!
Je ressens soudain comme un poids qui est retiré de mon ventre. Un cri de bébé. C’est elle ? Le cri est suivi de bruits bizarres, gutturaux. C’est mon bébé ces vachissements bizarres ?! Je dis au Chti qu’on aurait ptête pas dû surnommer le bébé Mogwaï parce que là ça ressemble plus à un gremlins… Il me dit que ce n’est pas le bébé mais un bruit d’aspirateur. Soit. Je ne veux pas trop savoir ce qu’ils peuvent aspirer… On attend encore. On ne nous dit toujours rien. On a rêvé ce cri de bébé ? Et ce poids qui a été retiré de mon ventre ? Je tremble, je tremble. Qu’est-ce qu’il se passe ?! C’est long… Où est notre bébé ?!!
Et enfin, un petit paquet nous est apporté. La sage-femme le rapproche de mon aisselle, à la hauteur de mon visage. Emmitouflés dans un drap blanc, un bonnet enfoncé jusqu’aux sourcils, un petit visage pointu et deux grands yeux bleus foncés nous fixent. Lucie…
– Ce qu’elle est petite…
– Elle fait deux kilos huit.
– Moi aussi j’étais petite, je faisait deux kilos quatre…
– Non, elle fait deux kilos, virgule zéro huit…
– Oh… C’est vraiment tout petit ça…
On la dévore des yeux sans oser esquisser un geste. Un doute me saisit : c’est bien une fille ? Avec tous les retournements qu’il y a eu sur son sexe, on ne sait jamais… La sage-femme confirme. Trop rapidement, la sage-femme se relève. Elle invite le nouveau Papa à la suivre. Ils partent.
Je me retrouve seule, à nouveau. Je contemple le drap vert immaculé et le faux plafond. Cela s’active de l’autre côté du drap dans un brouhaha d’instruments. Derrière moi, l’anesthésiste baille aux corneilles. Mes bras tremblent toujours terriblement. Je me concentre sur cette sensation, essaye de retrouver le contrôle. En vain. Je tente de bouger mes orteils de l’autre côté du drap. J’ai vraiment plus aucune sensation… D’un autre côté tant mieux…
Des bruits de scotch énorme et finalement le gynéco vient de l’autre côté du drap me parler. L’opération s’est bien déroulée, je peux toujours (lors d’éventuelles prochaines grossesses) accoucher par le bas, j’ai un redon (redon kézako ?) car Lucie a lâché ses premières selles dans mon ventre, mon placenta a été envoyé pour analyse au vu de la taille anormale du bébé, je vais maintenant être placée deux heures sous surveillance en salle de réveil. Je hoche la tête, ne comprenant qu’à moitié.
Un brancard est amené à côté de la table. J’essaye d’aider à me transvaser en me basculant le torse mais le bas de mon corps est comme un poids mort. On me glisse alors sur une planche, me roule. C’est reparti. Le plafond défile. Une nouvelle pièce, plus sombre. On me laisse dans un coin. Une dame vient régulièrement prendre ma tension, presser mon ventre pour sortir des caillots de sang, observer mes urines, mon redon, ma cicatrice… Derrière moi une fenêtre et la nuit noire.
L’horloge affiche bientôt 2h. Je m’ennuie. Je suis fatiguée et lasse. Je me demande où est Julien. Où est Lucie ? Pourquoi je suis seule. Les deux heures de peau à peau dont on m’a cassé les oreilles durant ma grossesse, ces deux heures pour créer le lien maman-papa-bébé, pourquoi pas nous ? C’est le protocole de la césarienne ? Après vu comment je tremble, il vaut mieux que je ne la tienne pas…
Je m’ennuie ! J’entends l’infirmière au loin dans un autre coin de ma pièce qui tape sur un clavier, le vrombissement de la couverture chauffante sur mon torse. Je m’ennuie tellement. Je n’aime pas ne pas maîtriser ce qu’il m’arrive, je ne sais pas ce qu’il va, ce qu’il doit, se passer. J’avais pas pensé que j’aurais une césarienne avec ma grossesse « RAS » et mon bassin de compet. J’étais pas préparé à ça…
Je me concentre pour essayer de retrouver le contrôle de mon corps. Il faut calmer les tremblements de mes bras et retrouver la mobilité de mes jambes. Ah mes orteils gauches tressaillent ! J’essaye encore et encore. J’ordonne à mes jambes de bouger. J’arrive à faire tressaillir tout le bout du pied gauche maintenant !! Je m’entête.
Mon Chti revient. Il fait fatigué. Il m’explique. Lucie est en néonatalogie dans une couveuse. Aux premiers examens, elle irait plutôt bien à part sa taille beaucoup trop petite pour un bébé à terme. Elle va y rester et être mise sous perfusion, ils ont peur qu’elle ne perde trop de poids et descende en-dessous des 2kg autrement.
Il me tend l’appareil photo pour me montrer les photos et la vidéo de Lucie qu’il a prises, homme prévoyant et pensant à la nouvelle maman frustrée loin de son bébé que je suis. J’en oublie même un instant de gigoter mes orteils. Je scrute le petit écran de l’appareil photo. Qu’elle est petite dans sa grosse boîte en plastique, qu’elle fait perdue dans sa couche, que ses jambes sont maigrichonnes. Mais surtout quelle moue toute mignonne… Ma petite petite fille…
La pédiatre de garde vient me voir et répète ce que le Chti vient de m’expliquer. Elle me demande pourquoi Lucie est si petite. Je réponds poliment que cela n’était pas prévu et que nous l’ignorons. En moi-même je me dis que ce n’est pas moi la docteur et que ce serait à moi de poser cette question ! Le Chti repart auprès de Lucie. Revient avec son téléphone pour envoyer un MMS à la famille afin de signaler la naissance de bébé et que nous allons bien. Le réseau passe mal, il peste. Je bouge sans relâche mes jambes. J’arrive maintenant à soulever ma jambe gauche ! Et la droite bouge de mieux en mieux. J’ai le sentiment d’une très grande victoire !
3h30 tapante, je récupère bien de l’opération et les 2h de surveillance se termine. Je vais être conduite dans ma chambre. Gentiment, ils font un crochet par la néonatalogie où ils nous laissent 10 minutes au côté de la couveuse de Lucie. Mon brancard est monté pour être à sa hauteur. Je peux voir son petit bout de visage endormi, si paisible dans sa caisse en plastique…
Le reste de la nuit coulera rapidement avec un réveil toutes les 30 minutes pour des soins et des examens. Avec le jour arriveront la douleur de l’opération, la culpabilité d’avoir mal fait mon boulot et de ne pas avoir pu accoucher normalement, la peur en attendant les résultats d’examens d’une séquelle grave et incurable, la tristesse de la savoir seule au fond de sa couveuse et sans chaleur humaine, la sidération avec le sentiment diffus de ne pas être passé loin d’une issue moins heureuse, … Plein de sentiments négatifs que nous apprendrons à apprivoiser et relativiser en découvrant notre petite fille.
En théorie j’ai accouché, dans tous les cas je suis maman de la plus jolie des petites filles de la maternité et du monde entier !!