Je vous ai jusqu’à présent rapidement évoqué Shanghai quand je vous ai raconté notre balade dans la concession française avec Chou et Émilie avant notre départ pour Qibao, mais avant de clore ce voyage, cette ville mérite une petite note rien que pour elle.
Nous sommes arrivés à Shanghai le jeudi soir après un voyage de 5h30 en train express depuis Beijing. Le train express chinois est l’équivalent de notre TGV, roulant à 300km avec une demi-douzaine d’arrêt entre Beijing et Shanghai (équivalence du trajet en France: Lille – Marseille).
Nous avons réservé nos billets dans l’auberge de jeunesse et s’ils avaient songé à demandé si nous souhaitions un train express (et heureusement que j’ai dit oui !) et quelle classe (180€ premières classe, 111€ seconde classe pour deux), ils n’ont pas songé à nous prendre des places côte à côte. D’autorité je me suis assise près du Chti (et de la fenêtre !!) et très gentiment tous les passagers successifs dont j’ai accaparé le siège ont compris que nous souhaitions échanger de place.
Le voyage est longuet, mais instructif. Comment mieux comprendre l’expression « Chine, terre de contrastes » qu’en apercevant dans trois champs successifs un homme labourer à la force des bras son champ, tandis que son voisin guide son cheval dans la même tâche et que le troisième chevauche fièrement son vieux tracteur ? Et on réalise également mieux l’immensité du pays, surtout lorsque l’on vient d’un petit pays comme la France.
Arrivés à Shanghai, nous sommes accueillis tels des princes par un chauffeur. Vincent a en effet eu la délicate attention de demander à un des chauffeurs de son entreprise de venir nous prendre à la gare de Hongqio. Si nous avions au début protester, après tout la ligne 10 est directe pour rejoindre de la gare leur appartement, c’est finalement avec délice que nous nous sommes écrasés dans les sièges en cuir de la limousine. Le chauffeur avec prévenance (ou par passion véritable ?) nous a alors fait découvrir Shanghai au son de vieux CD rayés de chansons françaises d’après-guerre. Ambiance surréaliste, entre ces vieilles ritournelles de l’autre siècle et cette multitude de modernes grattes-ciels chatoyant de couleurs…
Le symbole de Shanghai est le Bund (terme anglo-indien signifiant « rive boueuse »), appelé par les locaux 外灘 (waitan) c’est-à-dire la « berge des étrangers ». Auparavant dans la concession internationale, ses 1,5km le long du Huangpu sont la promenade préféré de ses habitants. C’est sur la rive en face que ce sont développés les grattes-ciels sur le quartier de Pudong tandis que le long du Bund des vieux bâtiments des années coloniales résistent.
Dès le vendredi, il était prévu que nous allions nous y promener. Mais rentrant de Qibao et toujours fatigués de la Grande Muraille, nous avons dans un premier temps lézardé au soleil dans le parc au pied de notre résidence. Bronzer (ou sur-crâmer dans mon cas) en observant Louis et Émilie jouer au milieu des autres enfants d’expatriés était très relaxant. La soirée arrivant, il était prévu de rejoindre Vincent à son boulot avant de partir manger tous les quatre dans un restaurant.
Le Chti et moi repartons direction Nanjing Donglu. nous avons une petite heure pour visiter le Bund avant de retrouver Vincent devant l’Apple Store et rejoindre Chou au restaurant. Nanjing Donglu est l’équivalent pour Shanghai des Champs-Élysées parisiens, naturellement en plus moderne et encore plus luxueux. C’est une très large rue, totalement piétonne. Touristes, consommateurs, passants et démarcheurs s’y croisent et s’y recroisent dans une joyeuse cohue. Les plus grandes marques de la planète s’y affichent, dans des devantures exubérantes, sur des écrans de pub géant diffusant en continue le même spot, des centaines de néons multicolores se reflètent sur le sol et dans mes lunettes.
Au loin, au fond de la rue, se découpe dans le ciel rosissant un building. Je regarde mon plan et ni une ni deux le pointe du doigt au Chti. Et nous sommes partis pour faire la longue rue au milieu d’une foule toujours plus compacte. Je me serais pourtant retourné, j’aurais distingué la Pearl Tower dans mon dos, mais cela je ne l’ai su que 20 minutes plus tard quand arrivés au People’s Square je me suis rendue compte de mon erreur !
Pour ce soir là, c’était raté. Lot de consolation, nous avons cependant pu apercevoir le Bund depuis le haut des bureaux de Vincent. Bureaux qui, pour l’anecdote, se situent au-dessus d’un mall. Pour y accéder, il faut entrer dans le centre commercial. Pour un manager de magasins ou de biens de consommations, cela peut sembler normal, mais dans le cas de Vincent, c’est assez inattendu !
Le lundi, il était au programme de refaire une tentative pour le Bund avec Morgane et sa famille. Nous les avons rejoint en début d’après-midi, et notre première visite a été pour la plus haute tour de Shanghai: le Shanghai World Financial Center Observatory. Le nom est à coucher dehors, je vous l’accorde, moi je ne l’appelle que par son petit surnom qui lui va si bien: le DÉCAPSULEUR ! Malheureusement, c’est jour de nuages, donc à 492m de haut, on ne voit pas grand chose. Nous sommes juste entourés de nuages, j’ai l’impression de marcher dans de la ouate. Je me suis un instant crue au royaume des Bisounours !
C’est quelques heures après que nous décidons de partir sur le Bund nous promener. Le chauffeur nous conduit (tel un dératé, la ceinture et la prière à saint Jveuresterenvie ne sont pas en option, même si elles ne garantissent pas de rester en vie avec lui !) vers la promenade. Rapidement nous nous retrouvons dans des bouchons, autour de nous des bâtiments datant des années 1920, de type occidentaux. Ils sont construits me dit-on sur des pilotis (de bois alors) comme beaucoup de bâtiments à Shanghai. Ce qui semble logique une fois que l’on apprend la traduction de Shanghai et que la ville s’enfonce chaque année de 1,5cm dans le sol…
上海
shànghǎi
上 (shàng) : sur, au-dessus de et 海 (hǎi) : mer
C’est enfin le Bund. À nouveau j’aperçois au fond les hautes tours de Pudong. Enfin… J’aperçois… J’entraperçois plutôt ! Et entre deux têtes. Et trois secondes maximum ! Le Bund est rempli, plein à craquer, bourré ! C’est même étonnant que le sol ne s’effondre pas sous le poids de la foule. Il me semble que les 16 millions d’habitants se soient donnés rendez-vous ici !! Nous fuyons plus vite que nous ne sommes arrivés. Tant pis pour le Bund, il ne me verra pas ! Nous nous sommes finalement réfugié dans un mignon parc de la concession française où nous avons regardé des couples danser du foxtrot.