Les vacances en Bretagne ont été aussi la première occasion de présenter la mer à Lucie, une présentation qui me tenait à cœur. Et pour cette première fois, Lucie ne pouvait échapper à un premier et bref baptême d’eau salée !Vivement l’année prochaine pour lui faire apprécier plus ce moment !
Étiquette : vacances de Mogwaï 2015
Je suis habituée aux bouchons parisiens, par contre les bouchons dans le goulet de Brest, je n’avais pas encore pratiqué. Ce fut chose faite lundi dernier avec l’évènement qui agitait notre petit bout du monde : la frégate l’Hermione revenait en France après son premier transatlantique ! Quoi d’exceptionnel me demanderez vous ? Surtout pour une région habituée à fréquenter les vieux gréements et reconstitutions avec les fêtes de Brest ? Certes, mais l’Hermione est la réplique d’un navire symbole de la liberté et de l’amitié franco-américaine ainsi que la petite dernière de la grande famille des trois mats.Son original, sorti de l’arsenal en 1779, est une frégate armée de 34 canons placée sous le commandement du jeune lieutenant de vaisseau Louis-René-Madeleine de Latouche-Tréville. Cette Hermione conduisit en 1780 le marquis de La Fayette pour son second voyage vers les Amériques afin de porter secours aux insurgés américains, cette fois-ci avec l’appui du roi de France Louis XVI et des troupes françaises. La frégate accomplit plusieurs actions d’éclats contre les Anglais mais finira sa carrière bêtement au large du Croisic en 1793 sur un récif.
Si en 1779, alors que les chantiers navals français battaient leur plein, il ne fallut que neuf mois pour construire ce vaisseau de 46m de la poupe à la proue, portant 1500m² de voilure et dont le grand mât culmine à plus de 55m, en 1997 il fallut plus de 15 ans et une passion et une ténacité chevillées au corps pour mener à bien la reconstitution de ce trois mâts.
Le voyage inaugural de la reconstitution fut pour les Amériques, elle en revenait quand je l’ai croisé et autant vous dire que je n’étais pas seule…… mais que nous étions plutôt 200…… dont la frégate de la Marine nationale le Latouche-Tréville (vous noterez le judicieux choix du vaisseau de la Marine, clin d’œil au premier commandant de l’Hermione)… …et également le fringuant remorqueur l’Abeille-Bourbon (que vous saluez très très respectueusement quand il vous passe à côté et que vous êtes sur votre petite coquille de 10m de long…)…À côté de ces mastodontes des mers, il y avait également la Recouvrance (reconstitution d’une goélette, mise en service 1992)…… la Belle-Poule, le navire-école de l’école navale, mis en service en 1932 et qui participa à la Seconde guerre mondiale dans les Forces navales françaises libres (à noter cet autre petit clin d’œil de la Marine nationale à l’Hermione : cette Belle-Poule est le 4e bâtiment à porter ce nom, le premier fut attaqué par la frégate anglaise Arethusa en 1778 et fut le casus belli de la déclaration de guerre de la France à l’Angleterre, il transporta la même année le traité d’alliance franco-américain signé et combattit activement l’Anglais durant la guerre d’indépendance américaine)…… le sloop Saint-Guénolé (1948), le côtre l’Angélus (1954) et le sloop le Général Leclerc (1948), …… le sloop Loch Monna (1956)…… ou plus moderne le Class40 Bretagne – Crédit Mutuel Élite barré par son skipper Nicolas Troussel, deux fois vainqueur de la Solitaire du Figaro (mise en service 2013)…
Le spectacle était aussi en l’air : tout d’abord en haut des mâts quand les gabiers de l’Hermione commencèrent à carguer les voiles…… ou quand un marin de la Belle-Poule décida de monter en haut chercher un meilleur point de vue pour ses photos… … et dans les cieux, le ballet incessant des deux hélicoptères…… voletant d’un point à l’autre : de la canonnade de salut de l’Hermione…… à la réponse du Latouche-Tréville avec son canonnier en grand uniforme qui, sabre au poing, rythmait toutes les 10 secondes le coup de canon…… sans oublier au loin l’Abeille-Bourbon qui, remplaçant les canons d’artillerie par les canons à eau, refroidissait légèrement l’atmosphère alentour avec ses trois impressionnantes gerbes (le micro-climat brestois a enfin son explication !)…
Au milieu de tout ça, je dois vous avouer que je ne savais plus où mettre de la tête et que j’ai allègrement rempli les deux cartes mémoires de mon appareil photo. Bien entendu mon père et mon frère ne m’aidèrent pas du tout à rester calme et prirent un malin plaisir à me faire courir partout sur notre bateau (il y a 6 mois et demi, en sortant de la césarienne, j’aurai vraiment pas pu gambader ainsi, tel un lapin !). Si je devais conclure, je vous dirai que ce qui m’a le plus impressionnée de tout cette parade exaltante est le drapeau de l’Hermione qui est juste ÉNORMISSIME. Ce serait un drapeau donné par le porte-avion Charles-de-Gaulle, ce que je peux vous dire avec certitude c’est qu’il est à mon avis bien plus grand que la couette double dans laquelle je m’enroule chaque nuit !
En Bretagne, il y a mon pays de coeur : l’Armor (pays près du littoral) mais aussi l’Argoat (pays du bois/du bocage) avec lequel je suis beaucoup moins familière. Aussi c’est avec beaucoup de curiosité que j’ai découvert, avec la petite tribu de Blibli et Spunky, un bout des chemins de halage du canal Nantes-Brest.
L’idée de ce canal émerge dès le rattachement de la Bretagne à la France, au XVIe siècle, de désenclaver et développer la Bretagne centre grâce à une voie navigable la traversant de part en part. Faute d’argent et de suffisamment d’intérêts motivés, le projet est reporté et reporté et reporté indéfiniment jusque sous le règne de Napoléon où il devient un enjeu stratégique majeur. Brest et Lorient subissent un blocage maritime incessant de la flotte anglaise et sont totalement paralysées, sans approvisionnement en armes ou provisions.
Le projet est confié à l’ingénieur Guy Bouëssel en 1803. Huit rivières doivent être canalisées et trois montagnes traversées entre Nantes, Lorient et Brest. Soit 364km de canal sont à aménager, dont 67km totalement artificiels. Ce sera 238 écluses qui jalonneront le canal, dès que le dénivelé dépasse les 2 mètres.
En 1806 le chantier débute doucemet entre Nantes et Redon, en 1811 Napoléon passe un décrêt officialisant le début des travaux et l’emploi de prisonniers de guerre et condamnés pour sa réalisation. En septembre de la même année, la première pierre de la première écluse est posée.
C’est 20 ans plus tard, à la fin des années 1820,que les premières sections sont ouvertes à la navigation jusqu’à l’inauguration en grande pompe de la dernière écluse Guilly Glaz en 1858 par l’impératrice Eugénie .
Le canal permit effectivement un développement de la Bretagne intérieure, principalement autour de l’industrie ardoisière. Cependant, après avoir été attendu si longtemps et avoir mobilisé tant d’énergie et d’argent, il arrive trop tard et est très vite rattrapé par la modernité. Le chemin de fer, des bateaux-vapeurs plus gros que ceux halés au doux pas des chevaux et les premières routes le rendent trop petit et désuet à peine entré en fonction. Si bien qu’en 1923, une partie du canal (dont 17 écluses) sont englouties après la construction d’un barrage hydroélectrique par le lac artificiel de Guerlédan.
Le canal reste cependant une richesse pour le tourisme intérieur breton en proposant des promenades agréables et verdoyantes aux petits bateaux de plaisance, aux kayakistes, aux vélétistes et aux randonneurs. Une promenage agréable le long des chemins de halage ou aux lents rythmes des écluses…